Attention, des monstres (machistes, religieux, misogynes, politiques et j'en passe) tentent par tous les moyens de faire peur aux femmes et surtout de nous empêcher d'avoir l'accès à la pilule du lendemain (que l'on devrait appeler la pilule d'urgence).
Cette article détricote tous les mensonges propagés à ce sujet et nous permet de nous rendre compte que la pilule d'urgence n'a aucun risque d'une part et qu'il y a bien une lutte insidieuse pour faire régresser le droit des femmes.
Je copie-colle au cas où :
La Coupe d'Hygie
Blog d'un pharmacien qui essaie de se mettre à la place du patient
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C’est la pilule de la minute, pas du lendemain !
Suite au tutorial, je lis depuis une semaine un certain nombre de réactions d’étudiants en pharmacie ou de pharmaciens sur la contraception d’urgence qui me navrent. Un patient vient chercher chez un pharmacien des compétences scientifiques. Pas un jugement de valeur, un cours de morale ou une démarche irrationnelle. Alors j’ai décidé de compiler ces affirmations répétées par ces professionnels de santé (ou futurs professionnels) sur la pilule du « lendemain » afin de les déconstruire.
« Avoir une pilule du lendemain en avance diminue l’utilisation de la pilule classique et augmente les pratiques à risques et les rapports non protégés »
FAUX. Cette affirmation est non fondée scientifiquement. La Haute Autorité de santé (HAS) a effectué une revue de la littérature scientifique. Elle en conclut : « il est peu vraisemblable qu’une prescription à l’avance systématique de la contraception d’urgence entraîne une augmentation des rapports sexuels non protégés ou des infections sexuellement transmissibles ou une réduction de l’utilisation de la contraception régulière » (source ici).
« La pilule du lendemain chamboule ton corps/ est dangereux pour la santé/provoque le cancer hormonodépendant/rend stérile »
FAUX. Le RCP (le document médecin) et la notice (document patient) listent les effets indésirables de ce médicament. Le cancer et la stérilité ne font pas partie des effets identifiés lors du développement de cette pilule ni lors des 15 années de son utilisation par des millions de patientes dans le monde.
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Fréquence non déterminée signifie que quelques cas ont été rapportés après la commercialisation du médicament et que ce nombre de cas est insuffisant pour déterminer une fréquence.
« L’usage répétée de la pilule du lendemain est dangereux pour la santé »
FAUX. L’OMS évoque les effets secondaires listés dans le RCP et dit je cite : « une utilisation fréquente peut avoir des effets secondaires, comme l’irrégularité du cycle menstruel, bien qu’un usage répété n’entraîne aucun risque connu pour la santé. »
« La pilule du lendemain, c’est 100/500/1000 fois la dose d’une pilule classique, cette surdose d’hormone peut être dangereuse »
FAUX. Les pilules dites classique contiennent 2 substances actives : un oestrogène et un progestatif. La contraception d’urgence au Norlevo ne contient qu’un progestatif. La comparaison est hasardeuse. En fait, la dose en progestatif du Norlevo est 10 fois supérieure en comparaison d’une pilule oestro-progestative. Et on atteint dans le pire des cas 50 fois pour une pilule microprogestative (Microval). Mais même à 50 fois, est-ce un argument pertinent ? Absolument pas. Nous avons vu dans le RCP les effets indésirables de la contraception d’urgence. Et bien le RCP évoque aussi les cas de surdosages en disant, je cite : « Aucun effet indésirable grave n’a été rapporté après absorption de fortes doses de contraceptifs oraux. Le surdosage peut entraîner des nausées et des hémorragies de privation. »
Donc même si une femme décide d’enchainer 3 boites de pilules, cela n’aura pas de conséquence grave. Contrairement au paracétamol qui lui vous enverra aux urgences hospitalières avec 1 seule boite.
« Si je délivre la pilule à un homme, la patiente n’aura pas l’information »
Gné ? Et pour les autres médicaments sans prescription ? Paracétamol, laxatifs, anti-inflammatoires provoquent chaque année des décès. Aucun à ce jour avec la contraception d’urgence. Les risques de mésusage et la fréquence d’effets indésirables graves avec d’autres médicaments sans prescription sont nettement plus importants que ceux de la contraception d’urgence. Etonnamment, on ne refusera jamais à un homme d’acheter du paracétamol pour sa compagne. Par contre, on inventera toute sorte de raisons grotesques ou singulières pour la contraception d’urgence. Par exemple : « et si l’homme fait prendre à sa compagne le médicament à son insu ? » Mais jamais on ne se demandera : et si l’homme mettait une boite entière de laxatif dans le café de sa compagne ?
Grotesque. Pourquoi chercher des situations improbables, irrationnelles ou des faits divers pour justifier un frein à l’accès de la contraception d’urgence ? Il faut travailler sur ces préjugés et encourager l’implication de l’homme dans la contraception.
« La réglementation interdit au pharmacien de délivrer plus d’une seule boite à la fois »
VRAI. La contraception d’urgence contient une substance inscrite sur une liste d’exonération. Cette liste limite la dose pouvant être remise à un(e) patient(e) en 1 seule fois. Et cette dose correspond à 1 seule boite. Mais, ce n’est pas le seul médicament dans ce cas. En effet, le pharmacien ne peut pas non plus vous remettre 2 boites de :
ibuprofene 200 mg (boite de 30 – par exemple Nurofen, Advil, etc…)
lopéramide 2 mg (boite de 12 – les versions « conseil » de l’équivalent d’Imodium)
loratadine 10 mg (boite de 7 – par exemple Humex Allergie)
amorolfine (vernis contre les champignons des ongles)
néo-codion (codeine pour traiter la toux sèche)
Donc si le pharmacien respecte l’arrêté, il doit refuser de vendre 2 boites pour TOUS ces produits.
« C’est la pilule du lendemain pas de la minute. Les femmes peuvent attendre 24 h. Elles n’ont pas besoin d’en avoir chez elle »
FAUX. Le terme « lendemain » est un faux ami. Le terme adéquat est « contraception d’urgence ». Le mot urgence souligne l’importance d’une prise rapide. Plus cette pilule est prise tôt, plus la contraception d’urgence est efficace.
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La HAS recommande de la prendre de préférence dans les 12 heures qui suivent le rapport (source ici). 12 heures ! Donc oui, il y a bien urgence. D’où l’intérêt d’avoir une boite en avance pour ne pas chercher en panique une pharmacie ouverte un dimanche soir.
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« Une pilule d’urgence n’est pas efficace si elle est prise juste avant d’avoir un rapport sexuel »
FAUX. Une revue de la littérature par le Cochrane a évalué l’indice de Pearl (% de grossesses sur un an avec une méthode de contraception) à 5 pour un moment de prise juste avant ou juste après le rapport sexuel. La pilule d’urgence peut donc être prise juste avant le rapport sexuel non protégé. Toutefois cette prise « juste avant » n’est pas reconnue dans l’AMM où il est indiqué de la prendre juste après le rapport.
Il faut éviter d’utiliser trop souvent la pilule du lendemain car ce n’est pas une méthode de contraception efficace
VRAI. Mais cette affirmation doit être pondérée. Les contraceptions les plus efficaces sont : la stérilisation, les DIU (improprement appelé stérilet) et l’implant. Les taux d’efficacité dans la vie réelle approchent les 100%. Les autres méthodes hormonales (pilule, anneau vaginal…) sont également des méthodes dite efficaces mais ont une moins bonne efficacité dans la vie réelle que le DIU, l’implant ou la stérilisation.
Viennent ensuite les autres méthodes de contraception : préservatif, spermicide, diaphragme, éponge vaginale, méthode naturelle, etc… Si une femme décide d’utiliser la contraception d’urgence comme contraception régulière, cette méthode s’inscrit alors dans cette 2e liste. Et son efficacité se compare assez favorablement aux préservatifs masculins et féminins (source ici).
Et face à ces autres méthodes (spermicides, éponges, méthodes naturelles…), elle est bien plus efficace pour éviter une grossesse non désirée. Cette contraception peut donc être une alternative pour certaines femmes qui ne souhaitent pas prendre la pilule classique, utiliser de DIU ou de préservatifs et qui n’ont pas de relations sexuelles fréquentes.
Par contre, comme toutes les autres méthodes à l’exception du préservatif, la contraception d’urgence ne protège pas des infections sexuellement transmissibles.
Une fois l’information remise, c’est à la patiente de décider en parfaite connaissance de l’efficacité de chaque méthode quelle contraception lui conviendra le mieux compte tenu de sa vie sexuelle et du risque de grossesse
N’hésitez pas à me transmettre d’autres affirmations « curieuses » que vous auriez entendu pour une mise à jour de ce billet.
Remarque : ce billet est centré sur la contraception d’urgence au lévonorgestrel (Norlevo) appelée improprement pilule du lendemain et utilisable jusqu’à 3 jours après le rapport. C’est la pilule d’urgence à utiliser en première intention. Si ce délai est passé, il existe une pilule du surlendemain (jusqu’à 5 jours). Enfin, le DIU au cuivre peut être utilisé jusqu’à 5 jours également : c’est la contraception d’urgence la plus efficace.