@Antichesse Mettons-nous d'accord sur notre désaccord.
La simplification que tu évoques n'est, à mon avis, ni justifiée, ni souhaitable. Une langue représente une vision du monde, distincte de toutes les autres. La simplifier car elle contiendrait trop de cas particuliers reviendrait à supprimer artificiellement des possibilités d'expression (fussent-elles issues d'une époque révolue). Et puis, qui devrait décider des simplications à mener ? Pourquoi ne pas directement concevoir un langage à visée utilitariste ? Parce que cela a déjà été fait, et que cela ne s'est jamais diffusé à grande échelle dans la population (parce que cela reviendrait de facto à apprendre une nouvelle langue).
Toutes les langues du monde ont une version "simplifiée", que les gens utilisent couramment pour communiquer, et qui comprennent des raccourcis, des coupures, des euphémismes et autres procédés permettant, sans être un expert dans sa langue, de comprendre et se faire comprendre. Dans la vie de tous les jours, cette version "simplifiée" est souvent préférée car plus facile et plus rapide à utiliser.
Je pense que les langues évoluent naturellement, que des mots apparaissent, que d'autres tombent en désuétude. Les dictionnaires intègrent d'ailleurs régulièrement de nouveaux mots (qu'on les aime ou pas). Imagine-t-on les chinois demander une simplification de leur langue, alors que chaque symbole est, en soi, un cas particulier ?
Je pense que cette simplification est une fausse bonne idée, destinée à donner l'illusion d'une plus grande accessibilité de la langue française à tout un chacun. Un peu comme les réformes des programmes scolaires, n'ayant de cesse de tailler dans les contenus, afin d'augmenter les taux de réussite aux examens.
Au lieu de vouloir sans cesse faire disparaître les particularités de la langue française, il me semble qu'il vaudrait mieux renforcer l'apprentissage tout au long du parcours scolaire, et cesser de la dénigrer. Au lieu de se lamenter sur la difficulté insurmontable que représente le bon usage de l'expression écrite ou orale, peut-être devrions-nous cesser de dénigrer cette langue comme le font les entreprises (avec le jargon managérial insupportable), ou notre cher Président de la République, qui ne perd pas une occasion de nous rappeler que l'anglais est la langue de l'avenir.
Une langue dois vivre, c'est entendu. Mais plutôt que de lisser les aspérités orthographiques et grammaticales, peut-être devrions nous exercer les enfants à faire travailler leur mémoire. Je rappelle que l'apprentissage par coeur (quand il est utilisé à bon escient) est la méthode la plus égalitaire qui existe. Elle ne dépend pas de l'origine sociale de l'enfant, et des capacités qu'ont les parents de l'aider au quotidien. Sans vouloir verser dans la nostalgie, il suffit de jeter un oeil aux productions écrites des enfants de l'époque de nos parents ou grand-parents, pour s'apercevoir qu'ils maitrisaient pour la plupart les règles d'écriture qui nous semblent si terribles aujourd'hui. Etaient-ils donc tous des génies ? Disposaient-ils de capacités surhumaines qui auraient disparues en une ou deux générations ?
Au fond, au lieu de tirer tout le monde vers le bas en supprimant les particularités linguistiques et en promouvant constamment l'usage de l'anglo-américain (mal utilisé d'ailleurs), peut-être serait-il plus judicieux d'augmenter le budget de l'éducation nationale et de réduire le nombre d'élèves par classe, afin que ceux-ci aient non pas la possibilité, mais l'assurance de maîtriser leur langue, afin de l'utiliser dans les contextes de leur choix.
L'un des effets pervers de cette simplification serait sans doute l'apparition de deux groupes de francophones : ceux parlant un français épuré et fade, pauvre en vocabulaire et à visée purement utilitariste. Les autres parlant le "vrai" Français, parce qu'ils auraient eu l'opportunité de suivre un enseignement plus approfondi, souvent payant, qui leur aurait été accessible (sauf rares exceptions) seulement grâce aux moyens que leurs parents y auraient consacré. On imagine sans peine les portes professionnelles s'ouvrant devant ceux disposant de cet avantage. Et encore une fois, ce seraient les plus aisés qui maitriseraient la rhétorique et l'art oratoire.
Sans compter que "la suppression pure et simple des exceptions et la standardisation de l'écriture des syllabes" donneraient l'impression d'utiliser une langue sortie tout droit d'un cours de théorie des langages, laquelle ferait le bonheur des concepteurs d'automates de parsage.
Peut-être suis-je trop alarmiste. Mais je pense qu'il vaut mieux donner l'opportunité au plus grand nombre de maîtriser sa langue telle qu'elle est, afin que tous puissent s'exprimer clairement sur leurs attentes (Cf Nicolas Boileau), plutôt que de céder à la facilité de faire des concessions incessantes, quitte à perdre ce qui fait l'originalité et la beauté de la langue française.
Petite liste des qualificatifs utilisés par Macron pour désigner les français.
Un coup de chapeau à l'auteur, qui dénonce la forfaiture de Macron amenant à l'éviction totale de la langue française, avec des arguments en béton.
J'ai eu des frissons en lisant l'article.